Bonjour à tous,

Grâce à quelques courageux pionniers, qui ont eu l’audace de faire l’éloge du moins dans notre monde du « toujours plus », le jeûne a retrouvé ces dernières années sa place méritée au rang des thérapies essentielles.

Il faut dire que le jeûne, ce soin par le vide, est un « nettoyage » qui montre une efficacité remarquable pour la santé :

Les études récentes soulignent son efficacité contre l’hypertension artérielle [1], le diabète de type 2 [2], montrent qu’il peut inverser les douleurs chroniques, celles de l’arthrose [3] ou de la polyarthrite rhumatoïde [4], qu’il est utile contre la fibromyalgie, la baisse de moral, les maladies digestives, le surpoids et qu’il améliore également la qualité du sommeil. [5]
Bref, ce n’est peut-être pas un hasard si nos ancêtres jeûnaient et si nous retrouvons à notre tour le goût…d’un peu de privation.

Il suffit d’une courte recherche sur Internet pour découvrir d’excellents programmes d’accompagnement pour les personnes qui souhaitent être guidées dans leur (re)découverte du jeûne.

Pour vous aider à démarrer, je vous conseille le film « Le jeûne, une nouvelle thérapie » des réalisateurs Thierry de Lestrade et Sylvie Gilman, un documentaire très fouillé qui a contribué à remettre le jeûne au coeur des pratiques thérapeutiques actuelles.

Mais j’aimerais aujourd’hui vous parler d’un autre type de jeûne.

Un vide qui est aussi essentiel que la restriction alimentaire, mais que l’on sous-estime beaucoup.

Le silence.

Il cherche le silence depuis…35 ans ! Voici ce qu’il a trouvé

Savez-vous qu’il existe sur terre un homme qui passe sa vie à chercher le silence ? 

[6]Depuis 35 ans, le « bio-acouousticien » américain Gordon Hempton parcourt le monde, un micro à la main, pour traquer les sons de la Nature (biophonie – sons des êtres vivants – et géophonie – sons des éléments naturels), et chercher ce qu’il appelle des « zones à l’abri des nuisances sonores ».

Il s’agit d’endroits où l’on n’entend aucun bruit d’origine humaine (anthropophonie) pendant plus de quinze minutes successives [7].

D’après Hempton, il y en aurait à peine une cinquantaine dans le monde (et AUCUNE en France !!!).

C’est dire si le silence est un bien précieux qui se raréfie toujours plus à mesure que se développent le monde – et les bruits – des hommes.

Et pourtant, quel trésor que ce silence !

Hempton lui-même décrit à quel point l’absence totale de bruit déclenche un formidable sentiment de bien-être :

« Dans ces moments-là, je sais ce qui est bien, et je sais ce qui est mal. »

« Dans le silence, je sais ce que je suis, et je sais ce que je fais. »

Alors même s’il est peu probable que nous trouvions l’une ou l’autre de ces zones totalement vidées de bruit humain, la quête d’un silence intérieur doit sans doute elle aussi (re)devenir un objectif prioritaire pour notre santé.

Lâcher les téléphones, les écouteurs, éteindre ces connexions qui nous ramènent toujours au bruit, au brouhaha, à la confusion.

Et se recentrer sur soi-même, en silence.

Dans le jeûne alimentaire, l’organisme puise dans ses réserves de glucose, épuisées les premières 24 heures. Alors le métabolisme opère une transformation : les lipides (graisses) sont réquisitionnés puis transformés pour produire des corps cétoniques, qui remplacent les glucides nécessaires au fonctionnement du cerveau.

Il me semble que le bruit fonctionne un peu de la même façon.

Sans bruit, l’homme est fiévreux, perdu. Le bruit le sécurise, devient comme ce glucose dont il est parfois dépendant. Le bruit est un tourbillon qui permet d’éviter de se regarder en face. Mais ce bruit est une « médication illusoire », et le corps comme l’esprit réclament un nettoyage par le silence.

C’est d’ailleurs ce que font les personnes qui méditent et qui savent qu’elles ne peuvent parvenir à lâcher prise que si elles atteignent le vrai silence intérieur. Lorsqu’elles y parviennent, les effets sur la santé sont réels, et démontrés par la science. La médiation :

  • Améliore la résistance au stress [8].
  • Est efficace contre la dépression [9].
  • Augmente les capacités cognitives à court et moyen terme [10].

Et les quelques études qui se sont intéressées aux effets du silence sont elles aussi intéressantes :

  • Des chercheurs ont montré que 2 heures de silence par jour stimulaient la régénérescence des cellules de l’hippocampe, responsable de l’apprentissage, de la mémoire et des émotions [11].
  • Une étude a montré que 2 minutes de silence suffisent au corps pour libérer la tension liée au stress. Mais les chercheurs précisent qu’il s’agit bien de 2 minutes de silence complet et non de musique relaxante [12].

Mais il y a plus puissant encore…

Devenez un résistant moderne : taisez-vous !

Car dans notre monde consumériste et affairé, bruyant et tourmenté, le silence me semble apporter une indispensable contradiction.

Je m’explique.

Imaginez que vous êtes dans un bois, seul, sous de grands hêtres, des chênes, des charmes ou des trembles, tous ces arbres dont les feuilles bruissent doucement avec le souffle du vent.

Fermez les yeux. Quelques cris d’oiseaux, quelques craquements d’écorce et bientôt, plus rien qui perturbe le silence.

Et pourtant…ce n’est pas un silence « de mort », un vide lugubre, un de ces instants angoissants où la vie semble avoir été « aspirée ».

Ce qui ressemble à une absence, un vide, est en réalité la manifestation de la plus intense des présences.

Le silence, c’est le démarrage de la vie.

« Que deviendra notre monde s’il ne recherche pas des espaces de silence » s’interroge le cardinal ghanéen Robert Sarah, dans un livre entier consacré au silence. [13]

« Le repos intérieur et l’harmonie ne peuvent découler que du silence. Les plus grands mystères du monde naissent et se déploient dans le silence ».

« Un arbre pousse dans le silence, et les sources d’eaux coulent d’abord dans le silence de la terre. Le soleil qui se lève nous réchauffe en silence, étincelant et grandiose. L’extraordinaire est toujours silencieux ».

C’est pourquoi, de la même façon qu’à notre corps qui déborde il faut faire parfois le cadeau du jeûne, à notre âme assiégée par le bruit, pensons de temps en temps à offrir le trésor du silence.

Maintenant je me tais, et vous laisse avec ce merveilleux compagnon.

A bientôt !

Gabriel Combris

Sources :

[1] Goldhamer A.C., Lisle D.J., Sultana P., Anderson S.V., Parpia B., Hughes B., Campbell T.C. « Medically supervised water-only fasting in the treatment of borderline hypertension ». J. Altern. Complement Med., 2002, 8 : 643-650.

[2] https://medicalxpress.com/news/2017-02-fasting-mimicking-diet-reverse-diabetes.html

[3] Schmidt S., Stange R., Lischka E., Kiehntopf M., Deufel T., Loth D., Uhlemann C. « Uncontrolled clinical study of the efficacy of ambulant fasting in patients with osteoarthritis ». Forsch. Komplementmed., 2010,17 : 87-94

[4] Müller H., Wilhelmi de Toledo F., Resch K.L. « Fasting followed by vegetarian diet in patients with rheumatoid arthritis : a systematic review ». Scand. J. Rheumatol., 2001, 30 :1-10

[5] https://www.passeportsante.net/fr/Therapies/Guide/Fiche.aspx?doc=jeune_th

[6] https://www.lemonde.fr/planete/article/2016/08/18/l-homme-qui-cherchait-le-silence_4984570_3244.html

[7] Si des ondes d’une fréquence percevable par l’ouïe humaine sont repérées par le sonomètre au moins tous les quarts d’heure, la zone n’est pas considérée comme silencieuse.

[8] Bentolhoda Kolahkaj and Fatemeh Zargar, Effect of Mindfulness-Based Stress Reduction on Anxiety, Depression and Stress in Women With Multiple Sclerosis, Nurs Midwifery Stud. 2015 Dec; 4(4): e29655.

[9] Stefan G. Hofmann, Alice T. Sawyer, Ashley A. Witt, and Diana Oh, The Effect of Mindfulness-Based Therapy on Anxiety and Depression: A Meta-Analytic Review, J Consult Clin Psychol. Author manuscript; available in PMC 2010 Apr 1.

[10] Keshav Thakur, Meditation effects on cognitive function and cerebral blood flow in subjects with memory loss: a preliminary study, Ann Neurosci. 2012 Apr; 19(2): 81.

[11] https://www.researchgate.net/publication/259110014_Is_silence_golden_Effects_of_auditory_stimuli_and_their_absence_on_adult_hippocampal_neurogenesis

[12] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1860846/

[13] La force du silence, Editions Pluriel.