Chère lectrice, cher lecteur,

La première est que vous allez sans doute, à la fin de cette lettre, avoir envie de repartir quelques jours…en vacances.

Car depuis le 24 juillet 2021, la ville d’eau de Vichy et son patrimoine thermal sont inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco !!

L’Unesco a reconnu « l’impact de l’activité thermale sur l’organisation des villes ainsi que l’apport médical et culturel de la pratique »1.

Encore une bonne raison d’aller aux thermes

Cette récompense remet les bienfaits des eaux thermales au cœur de l’actualité !

Depuis des années, de nombreuses études ont conclu à l’efficacité thérapeutique des cures thermales. Notamment et surtout pour les troubles de la sphère articulaire.

Les eaux agissent sur plusieurs plans : il y a la chaleur des eaux (plus de 45°C souvent) qui calme, décontracte et apaise notamment en renforçant le système transporteur de la sérotonine2. Et puis il y a l’action des boues, jets, vapeurs, inhalations…

Mais ce sont aussi les types d’eaux qui ont une action spécifique :

  • Les eaux sulfurées ayant un taux élevé d’acide sulfhydrique et de soufre ; action sur les muqueuses, contre les infections chroniques : rhinite, otite, asthme ou encore bronchite.
  • Les eaux sulfatées, présentant un taux élevé de soufre pour laquelle on va distinguer les eaux sulfatées calciques (action sur les affections rénales et métaboliques) et les eaux mixtes (action en cas d’eczéma).
  • Les eaux chlorurées, ayant un important taux de chlorure de sodium. Action sur les troubles du développement.
  • Les eaux bicarbonatées, riches en bicarbonate de sodium (action sur les affections gastro-intestinales et hépatobiliaires) ou en calcium (action anti-inflammatoire et cicatrisante dermatologique).
  • Les eaux oligo-métalliques, faiblement minéralisées mais contenant beaucoup de cuivre, de fer ou d’arsenic. Action générale sur le système immunitaire.

Ainsi, selon les eaux, des composés chimiques spécifiques vont passer la barrière semi-perméable qu’est la peau. On « ingère » par voie cutanée les minéraux et oligoéléments dans notre organisme, qui ont des vertus thérapeutiques à l’état de trace.

L’analgésique naturel !

Un nombre considérable d’études étudie les effets des bains thermaux sur les articulations et les problèmes d’arthroses et de rhumatismes. Notamment l’arthrose du genou dont le degré d’invalidité est élevé.

  • Une étude de 195 personnes souffrant d’arthrose du genou et ayant bénéficié de trois semaines de balnéothérapie en plus de leurs traitements et exercices habituels contre 187 patients témoins démontre dans ses résultats que 50% des patients ayant bénéficié de la thérapie thermale ont observé une amélioration minimale cliniquement importante après six mois (contre 36% dans le groupe témoin)3. Dans une autre étude, menée en parallèle, les bénéfices des eaux sulfureuses utilisées (en comparaison d’eaux du robinet) se maintiennent plus longtemps4.
  • Une méta-analyse étudiant les résultats de 16 études montre que les eaux minérales thermales peuvent significativement réduire les douleurs et améliorer les propriétés et fonctions physiques de l’articulation.5
  • Dans son numéro 18, la revue La Médecine thermale explique que les cures thermales peuvent avoir une action analgésique dans les affections musculo-squelettiques en général et en particulier « pour les affections articulaires mécaniques, les rachialgies chroniques, la fibromyalgie, les atteintes péri-articulaires et les rhumatismes inflammatoires »6.

Pour une fois la Sécu est en avance

La sécurité sociale française a en effet identifié douze domaines dans lesquels les bains thermaux montreraient des bénéfices thérapeutiques, dont la rhumatologie (arthrose, douleurs articulaire, rhumatismes…).

Si votre cure thermale est prescrite et concerne une des 12 champs d’action thérapeutique identifié par la Sécurité sociale, l’Assurance Maladie pourrait prendre en charge une partie de frais de votre cure.

C’est pour ça que je vous conseille VIVEMENT de vous renseigner et de planifier votre prochaine cure rapidement… 

Et quand la cure est finie, on peut profiter toute l’année des bienfaits des oligo-éléments puisqu’ils peuvent être pris par voie orale et ont fait montre d’effets thérapeutiques impressionnants, notamment dans le domaine musculosquelettique.

A titre d’exemple, le Dr Picard-Paix suggère dans son livre « Arthrose combat gagnant » sorti en 20217 quelques associations :

Les propriétés anti-inflammatoires et antioxydantes du cuivre en font un oligo-élément de premier choix dans le traitement de l’arthrose.

  • Associé au manganèse, on peut le prescrire pour les terrains inflammatoires (crises de goutte, névralgie…).
  • Associé au sélénium, on peut le prescrire également pour traiter les poussées douloureuses aigües.
  • Associé à l’or et l’argent, les oligothérapeutes le prescrivent dans les maladies liées au vieillissement.

Merci, monsieur l’abé !

Et puis bien sûr, pour ceux que le sujet intéresse, je vous renvoie aux livres des pionniers du soin par l’eau. le célèbre abbé Sébastien Kneipp (1821 – 1897)8, et l’un de ses « disciples », le Dr Oertel Bauer, dont la conviction était que si des domaines localisés de l’organisme se voyaient influencés par « l’excitation de l’eau », le métabolisme général l’était aussi, l’élimination des déchets se faisait mieux, et le dynamisme augmentait.

  • Les lotions ou lavages (froids et chauds) qui se pratiquent le matin, immédiatement après le lever. Le Dr Oertel Bauer, un disciple de Kneipp, détaille dans son livre « La santé par les plantes » les effets de telles « excitations » :

Lorsque l’eau froide affecte la peau, les vaisseaux se contractent puis se dilatent ensuite, et la chaleur se dissipe vers l’extérieur jusqu’au moment où une certaine compensation est atteinte. Si de la chaleur se produit au-delà du besoin de compensation, une réaction thermique intervient qui conduit à la sudation. Le centre respiratoire, en tout cas, se trouve stimulé. Les inspirations énergiques sont ici caractéristiques ; et elles ont en retour un effet favorable sur la circulation et le métabolisme.

Si la peau prend une coloration bleuâtre, il s’agit d’une mauvaise réaction, et il convient d’interrompre le lavage. Egalement, il est important d’habituer progressivement le corps à l’excitation froide, en procédant à de petites applications partielles répétées.

Lorsqu’on fait une application d’eau chaude, il se produit une large dilatation vasculaire qui s’étend jusqu’aux vaisseaux profonds et entraîne toujours une chute de tension artérielle. 

Toujours commencer par des lavages et des douches sur des parties éloignées du cœur, par exemple sur le pied ou la main.

La durée du lavage, de la lotion ou du bain froid ne doit pas excéder 2 à 3 minutes. Aux personnes qui « ne sont pas en possession d’une montre », l’abbé Kneipp conseillait pour s’y retrouver malgré tout, de « compter deux Pater (Notre-Père) pour une minute »…Soit six Pater au maximum.

  • Les applications ou compresses, laissées en place une demi-heure à une heure : froide, elles agissent « dans les maladies des organes digestifs et dans les affections d’origine cardiaques» ; chaudes, elles sont utiles en cas de gastro-entérites, maladies des reins, douleurs articulaires, asthme, bronchites. On recouvre la partie à traiter d’un morceau de toile mouillée, recouvert par une autre toile, sèche cette fois, puis d’une étoffe de laine.
  • Les enveloppements: il s’agit d’une technique proche de celle de l’application, à ceci près que la durée peut aller jusqu’à deux heures. « On les utilise pour obtenir la désagrégation et l’élimination intenses d’éléments malsains, ou bien une dérivation (c’est le cas notamment pour les enveloppements des pieds »). La couche de vapeur d’eau qui se forme dans l’enveloppement et entoure la peau calme les nerfs et diminue la douleur. Elle permet aussi de dilater les pores et les ouvertures des glandes sudoripares : la peau « rejette alors énergiquement les déchets ».

A noter que le Dr Bauer conseille d’utiliser l’infusion de camomille en addition à l’enveloppement en cas de plaies, d’inflammation et démangeaisons : on verse l’eau bouillante sur 3 poignées de fleurs de camomille, on laisse infuser 20 minutes et on applique ensuite l’infusion sur le tissu d’enveloppement. 

Autre technique intéressante, en cas d’eczéma, d’acné ou de piqures d’insectes, l’utilisation d’un cataplasme d’argile en addition à l’enveloppement. On étend l’argile sur la partie du corps à traiter, puis on enveloppe le linge intermédiaire et le lainage. Maintenir le traitement ainsi pendant 3 heures au mois. Son efficacité peut être renforcée par addition d’une décoction de prêle. 

Le bain aujourd’hui : c’est « Mozart qu’on assassine » !

  • Trop de gens se glissent dans leur baignoire comme dans un wagon de seconde, alors que le bain est un art à lui tout seul, qui se situe au carrefour de la santé et du bien-être.

Je ne parlerai pas du bain « sensuel » dans cette lettre où rôde la mémoire de l’abbé Kneipp – mais sachez que l’ajout de sels aux huiles essentielles (10 gouttes d’huile de petit grain bigarade, 5 gouttes d’essence de bergamote, 5 gouttes d’huile de cèdre de l’Atlas) donne une profondeur insoupçonnée à l’expérience…Les huiles choisies sont en effet des « harmonisantes », ce qui signifie qu’elles évacuent l’anxiété et apaisent le mental. Leur fragrance fine et subtile « invite au lâcher prise » – je n’en dis pas plus…

Dans la pratique, pour calmer les tensions nerveuses, et soulager les raideurs, on choisira une eau tiède, qui ne dépasse pas les 38 °. Un bain d’eau bien chaude aura lui de l’effet pour stimuler lacombustion d’énergie dans les cellules, et une eau froide, fortifiante, augmentera la pression des artères et ralentira les battements du cœur

L’art de prendre un bain est quasi infini, mais je m’en voudrais de ne pas parler des plantes, excellentes compagnes à ajouter : camomille et rose pour un bain réconfortant, valériane en cas de troubles du sommeil, arnica et reine des près pour un bain antidouleur etc. (Le matin, on fait macérer la fleur ou la racine dans un litre d’eau froide, pendant 10 à 12 heures, puis on fait bouillir et on ajoute la décoction à l’eau du bain).

  • Les douches : l’abbé Kneipp valorisait tout particulièrement la « douche du dos », qui avait pour lui une action plus forte que la douche complète, ainsi que la « douche éclair », dont l’action de son jet aigu peut être comparée à une sorte de massage percutant par eau froide.
  • Les affusions se pratiquent sur les mêmes parties que les douches (genou, cuisse, dos, bras, torse), mais il s’agit cette fois de faire ruisseler l’eau sans la projeter.
  • Enfin, les bains de vapeur, complets ou partiels, qui montrent une grande utilité en cas de grippe, bronchite, et rhume (bain de vapeur de la tête) mais aussi hypertrophie de la prostate ou cystite (bain de vapeur de la partie inférieur du corps).

On a ici besoin d’une marmite large que l’on remplit d’une infusion de camomille et de feuilles d’eucalyptus, et de couvertures de laine pour envelopper le malade. Pour faciliter la reproduction de la manœuvre chez vous, je reproduis ci-dessous les positions recommandées par le Dr. Bauer :

 

 

Il va sans dire que les critiques se sont lâchés contre une telle méthode. Généralement au motif qu’elle avait été établie par un religieux naturopathe mort il y a un siècle, et qu’à « l’ère des antibiotiques, de la chimie de synthèse, et des fusées dans la lune », on n’allait pas prétendre soigner quoi que ce soit avec de l’eau.

Classique.

Maintenant pour répondre à ceux qui trouvent tout ceci « totalement dépassé » je dis : « très bien, faites comme bon vous semble, mais…vous ne perdriez rien du tout à essayer ». Car même s’il n’est plus de ce monde, il me semble que c’est notre abbé Kneipp qui montrait le plus de bon sens :

« Le succès, disait-il est la meilleure marque de la vérité : ce qui convient à l’homme, c’est ce qui lui fait du bien, ce qui le guérit. »

« Quand le malade a été traité suivant les règles de l’art, et qu’il vient à mourir, c’est une mince consolation de savoir qu’il a été soigné selon les données de la science »…

Pas mieux !

Gabriel Combris

Sources : 

1. https://www.francebleu.fr/infos/culture-loisirs/vichy-inscrite-au-patrimoine-mondial-de-l-unesco-1627112104

2. https://www.medecinethermale.fr/fileadmin/Publications/Mag-medcine-18_web.pdf

3. http://dx.doi.org/10.1136/ard.2009.113209

4. Branco M, Rêgo NN, Silva PH, Archanjo IE, Ribeiro MC, Trevisani VF. Bath thermal waters in the treatment of knee osteoarthritis: a randomized controlled clinical trial. Eur J Phys Rehabil Med. 2016 Aug;52(4):422-30. Epub 2016 Feb 19. PMID: 26899038.

5. DOI: 10.1097/MD.0000000000024488

6. https://www.medecinethermale.fr/fileadmin/Publications/Mag-medcine-18_web.pdf

7. Dr Odile Picard-Paix, Arthrose, combat gagnant : oligo-éléments et autres traitements,Éditions Le Rocher Poche, 2021.

8. Abbé Sébastien Kneipp « Ma cure d’eau, ou Hygiène et médication pour la guérison des maladies et la conservation de la santé. »