Chers amis,
Comme tout le reste, les coûts de la santé explosent. Et c’est particulièrement vrai dans le cas des maladies neurologiques.
D’après une étude publiée en octobre dans la revue Neurology1, le prix des médicaments destinés au traitement de Parkinson, de la sclérose en plaques ou d’Alzheimer a ainsi augmenté de 217% sur une période de neuf ans…et cela concerne des médicaments qui sont déjà particulièrement chers.
Le dernier en date, le Donanemab, qui vient d’être autorisé aux Etats-Unis et qui devrait arriver en France, coûte entre 25’000 et 30’000 euros par an et par patient !
Mais pour quelle utilité ?
En ce qui concerne le Donanemab, on peut se poser la question :
une étude a ainsi montré qu’il ralentissait le déclin cognitif des patients de 0,45 point sur une échelle de référence (Revised Hasegawa Dementia Scale) de…18 points !
Au mieux, le Donanemab pourrait donc ralentir « très légèrement » le déclin d’un patient pendant…quelques semaines.
Ce qui est en revanche attesté, c’est la sévérité de ses effets secondaires…
Le médicament peut engendrer des hémorragies cérébrales, des œdèmes, qui surviennent dans plus de 10 % des cas !!! Il peut également provoquer des maux de tête, de la confusion, des vomissements, des troubles de la vision ou de la démarche, des crises d’épilepsie et, dans de rares cas, même…la mort !
Aucun bénéfice !
Et pourtant il est probable que lorsque ce médicament arrivera en France, les pouvoirs publics le rembourseront sans poser de question.
Cette approche absurde est la même depuis des décennies.
Le 19 octobre 2016, la Haute Autorité de Santé avait ainsi rendu un avis d’évaluation sur quatre des principaux médicaments prescrits contre Alzheimer : l’Ebixa, l’Aricept, l’Exelon et le Reminyl.
Verdict : leur intérêt est « insuffisant pour être pris en charge par la solidarité nationale » et ils finiront par être déremboursé en 2018, mais il serait dommage de ne pas revenir sur le parcours de ces médicaments qui ne servent à rien ; il vaut vraiment le détour.
Tout commence à la fin des années 70 lorsque des chercheurs découvrent un lien entre les troubles de la mémoire et la baisse de l’acétycholine, un neurotransmetteur impliqué dans la mémoire et l’apprentissage.
« On a imaginé augmenter la disponibilité de ce neurotransmetteur dans le cerveau en reprenant un vieux médicament des années 40, utilisé en anesthésie, la tacrine », explique le Pr. Saint-Jean
Trois essais seront organisés à partir de 1985. En France, En Grande-Bretagne et aux Etats-Unis.
« Les deux premiers ont été bien menés et catégoriques : aucun bénéfice ! ».
« Quant au dernier, il a été réalisé en Californie sur seulement 17 malades, avec une méthodologie douteuse et bâclée, et les résultats annoncés étaient spectaculaires. Aujourd’hui, on sait que les données ont été truquées »
Ce qui n’a pas empêché à l’époque le journal Le Monde, « quotidien de référence » comme il s’auto-proclame, de titrer : « La maladie d’Alzheimer enfin vaincue »…
Dans les cabinets des médecins, cela se traduit concrètement par un emballement du nombre d’ordonnances : dans les années 2000, près de 40 % des malades se retrouvent avec une prescription pour l’un ou l’autre de ces 4 médicaments. Coût pour la collectivité : 400 millions d’euros.
Et ce malgré les doutes permanents qui ont accompagné leur utilisation ainsi que des effets secondaires en pagaille : digestifs, cardio-vasculaires (potentiellement graves bien que peu fréquents), mais aussi des symptômes psychiques comme des cauchemars, des crises d’angoisse et, enfin, d’autres effets variés comme des crampes, des rhinites etc.
Aujourd’hui la communauté médicale se défend en disant qu’elle « attendait des études plus approfondies », explique le Pr Saint-Jean.
Mais elles ne sont jamais venues.
Mais qui a écrit ce truc là ?
Les entreprises du médicament étaient certainement trop occupées à déployer pendant le même temps un lobbying intense en direction des autorités. Et ce n’est pas comme si elles faisaient des efforts pour le cacher.
Ainsi, la commission de la transparence, en charge de l’évaluation des médicaments au sein de la Haute Autorité de santé, a reçu des courriers signés par des médecins de centres de mémoire, de neurologie, de gériatrie, tous en faveur de ces médicaments, qui étaient mot pour mot les mêmes que ceux présentés par les firmes pharmaceutiques devant cette même commission !
Dès 2007, une première tentative de déremboursement a été faite en Grande-Bretagne, puis en Allemagne et au Canada. Mais à chaque fois sans succès…
A propos du « lien thérapeutique »
Un des arguments évoqués pour maintenir ces médicaments en circulation était le fait qu’ils « maintenaient le lien thérapeutique avec le patient ».
C’est peut-être vrai sur le papier, mais dans la réalité, les études ont montré des résultats…inverses !
« Une vaste étude qui a suivi plus de 10 000 personnes en France montre que les personnes qui sont passées par les consultations mémoire et qui ont reçu des médicaments ont un plus mauvais pronostic et vont plus souvent que les autres en Ehpad (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) ! »
Des médicaments qui au mieux, ne servent donc à rien, mais qui aujourd’hui encore sont prescrits à près de 40 000 patients, soit une dépense de près de 130 millions d’euros pour la collectivité…
Comme s’il y avait une sorte d’impossibilité à avouer la vérité, c’est-à-dire que l’on n’a pas de médicament contre l’Alzheimer.
Le Pr. Saint Jean parle d’un « immense gâchis ». Et on ne peut qu’être d’accord avec lui, tant les sommes investies en pure perte dans ces médicaments pourraient servir à l’accompagnement des malades.
Et pourquoi ne pas financer plutôt certaines thérapies naturelles qui ont, elles, montré des résultats intéressants.
Je pense par exemple aux séances de musicothérapie dont les bienfaits ont été démontrés récemment encore par une équipe de recherche de l’Université de Genève.
Les scientifiques ont suivi pendant six mois 132 seniors entre 62 et 78 ans fraîchement inscrits à un cours de piano et qui n’avaient jusque-là jamais pratiqué la musique.
« Nous voulions des personnes dont le cerveau ne portait encore aucune trace de plasticité cérébrale liée à un apprentissage musical. En effet, même un bref apprentissage au cours de l’existence peut laisser des empreintes sur le cerveau, ce qui aurait faussé nos résultats. »2 explique l’auteur de l’étude.
Au terme des six mois, les chercheurs ont constaté que la neuro-imagerie indiquait que les « pianistes » présentaient une augmentation de la matière grise dans quatre régions du cerveau et que leurs performances cognitives avaient augmenté de 6%.
Bien que de nombreuses structures proposent ce type de thérapies en France, celles-ci sont rarement, pour ne pas dire jamais, remboursées par les caisses.
Et on peut en dire autant de l’aromathérapie qui pourtant a fait, elle aussi, ses preuves ; tout comme l’ensemble des thérapies par stimulation sensorielle d’ailleurs.
L’année passée par exemple, une étude publiée dans la revue Frontiers in Neuroscience3 a testé l’impact de l’aromathérapie sur la mémoire de patients atteints d’Alzheimer et les résultats parlent d’eux-mêmes.
« Les participants ont affiché une augmentation de 226 % de leurs performances cognitives par rapport à la cohorte témoin, mesurée par un test de liste de mots couramment utilisés pour évaluer la mémoire. »
Remboursera-t-on un jour l’aromathérapie ?
J’ai un doute.
Je pense plutôt que les pouvoirs publics vont s’entêter à soutenir d’autres traitements toujours plus chers, à l’efficacité douteuse, au lieu de mettre un peu d’argent dans des techniques alternatives corroborées par des contributions scientifiques parues dans des revues de renom…
Allez comprendre la logique… Même si je suis sûr que chacun a sa petite idée …
Santé,
Gabriel Combris.
Sources :
[1] https://www.sciencedaily.com/releases/2024/10/241030172047.htm
[2] https://www.unige.ch/medias/2023/la-pratique-musicale-freine-le-declin-cognitif
[3] Overnight olfactory enrichment using an odorant diffuser improves memory and modifies the uncinate fasciculus in older adults, 2023.