Chère lectrice, cher lecteur,

Lorsqu’on évoque les métiers à risque, on pense spontanément aux pompiers, aux hommes grenouilles, aux démineurs, aux aventuriers ou aux chercheurs d’or.

Mais on oublie quelqu’un.

Alors laissez moi vous le présenter :

C’est un(e) érudit(e), qui met volontiers son savoir au service des autres, un passionné qui sait utiliser les fabuleuses synergies de la nature pour améliorer la santé et le bien-être.

C’est un « scientifique-poète », qui voit dans la fleur, la racine ou la tige d’une plante, la beauté du monde aussi bien qu’un trésor inestimable de santé.

C’est un « alchimiste », pour qui le monde vivant n’a pas été créé pour que nous l’ignorions, mais pour que nous sachions y puiser « tout le bien qui, dès le premier atome de sable, y a été déposé pour nous. » [1]

Vous l’avez reconnu ?

C’est l’herboriste.

Une des bêtes noires de notre époque.

L’herboriste : un « Gaulois réfractaire » dans l’empire de PharmaCésar

Remarquez, cela ne date pas d’aujourd’hui.

Le diplôme d’herboriste a été supprimé en 1941, et depuis, la France reste le seul pays de l’Union Européenne à ne pas reconnaître la spécificité du métier d’herboriste [2].

Résultat : les herboristeries ont disparu, les unes après les autres.

Si mon compte est exact, il en reste aujourd’hui…15, contre 23 000 pharmacies.

Avec des pharmaciens qui ont le monopole de la vente et du conseil en matière de plantes médicinales…mais qui n’y connaissent plus rien du tout.

Et pour cause : ils ne sont absolument plus formés à l’utilisation des plantes médicinales durant leurs études.

Au passage, c’est la même chose pour les huiles essentielles : une récente enquête conduite en Suisse a montré que la plupart des pharmaciens ne savent absolument pas comment les utiliser !!! [3]

Au total, tout a été fait pour qu’il soit devenu très difficile de se soigner avec des plantes.

Plus dangereux qu’un terroriste…l’herboriste !

D’autant que les rares herboristes qui résistent encore, les « gaulois réfractaires » de l’empire de « Pharma César », ont l’interdiction TOTALE de parler des vertus thérapeutiques des plantes.

Qu’ils aillent dire que le fenouil aide à la digestion, que la valériane favorise le sommeil, que le thym et le romarin sont précieux pour renforcer l’immunité, et ils répondront de leurs actes devant un juge, qui les accusera d’exercice illégal de la médecine !

Attention, ce ne sont pas des menaces en l’air !

Michel Pierre, célèbre herboriste parisien, a été traîné au tribunal correctionnel… et condamné à des amendes pour avoir osé dire du bien de ses tisanes et de ses plantes.

Pourtant même le Procureur de la République a souligné l’absurdité de la situation dans son réquisitoire :

« Formellement, vous serez déclaré coupable, mais j’ai totalement conscience des limites de cette loi puisqu’on est dans une impasse totale. »

« On peut aussi déplorer que le savoir-faire des herboristes, qui existent depuis des siècles, voire depuis toujours, et qui sont les ancêtres des pharmaciens, se perde… J’espère que les législateurs trouveront les moyens de régulariser les choses » [4]

Des propos étonnants dans la bouche d’un procureur, certes, mais qui pour l’instant n’ont débouché sur rien.

En attendant, la répression continue :

Jean-Pierre Raveneau, un autre herboriste parisien, a été condamné à un an de prison avec sursis pour « exercice illégal de la pharmacie en récidive »… alors qu’il est lui-même docteur en pharmacie !

L’un de ses « crimes » était d’affirmer que 80 % des maladies pouvaient être combattues avec des plantes… ce qui est parfaitement exact !

Sans les effets secondaires des médicaments, ajoute Thierry Thévenin, producteur et herboriste dans la Creuse :

« Les pharmacies devraient d’abord balayer devant leur porte avant de s’en prendre aux personnes qui s’intéressent aux plantes…Il faut relativiser la dangerosité des plantes. »

« En revanche, combien de gens ont-ils été envoyés à l’hôpital à cause des médicaments ? »

Bonne question, à laquelle nous avons souvent proposé des éléments de réponse dans la lettre Directe Santé, que cela concerne les médicaments antidouleur (ibuprofène, Doliprane), les anxiolytiques, les anti reflux gastro-oesophagien (IPP), les antidépresseurs, etc.

Autant de bombes sanitaires que les herboristes savent parfaitement désamorcer !

Voilà pourquoi ces derniers irréductibles des plantes se battent aujourd’hui pour recréer un diplôme d’herboriste, comme il en existe en Allemagne, en Belgique ou en Suisse.

Et on ne peut que les soutenir dans leur initiative pour redonner sa pleine noblesse à ce formidable métier.

Exemple : la force tranquille des plantes…contre les allergies

Car les plantes – les « simples » comme on les appelle parfois – ne sont pas les « idiotes du village de la thérapeutique ». Non !! Elles sont sans doute les gardiennes les plus fidèles et les plus respectueuses de notre santé.

J’aurais mille exemples à vous proposer pour illustrer la « force tranquille des plantes », mais aujourd’hui, nous sommes un 21 mars, et le printemps s’installe.

Alors il y a un sujet qui s’impose de lui-même : le fléau des allergies saisonnières.

Nous sommes en effet passés d’un monde, au sortir de la première guerre mondiale, où 1 % de la population française souffrait de « rhume des foins », à celui d’aujourd’hui, qui compte plus de 30 % d’allergiques (asthme, rhinite, etc.).

C’est bien simple, quand le printemps arrive, c’est presque la moitié de la France qui éternue !

Est-ce un hasard, là encore ? Mais il semble que c’est bien la négation de la loi naturelle qui est en grande partie responsable de l’explosion sidérante du nombre des allergiques.

« L’excès de propreté » (l’hygiène partout, la douche matin midi et soir, etc.) la vie en ville dans des habitations moins aérées qu’à la campagne, la porosité intestinale liée à l’alimentation moderne, l’excès d’antibiotiques, ont en effet considérablement amoindri notre immunité, favorisant l’explosion des allergies.

En 1989, des chercheurs londoniens avaient déjà identifié le lien entre l’exposition aux microbes dans l’enfance et les allergies [5].

Depuis, plusieurs études ont constaté que les allergies sont moins fréquentes chez les personnes qui vivent avec des animaux domestiques [6], chez les enfants qui grandissent dans une ferme [7] ou qui vont à la crèche [8].

En effet, la vie en collectivité et le fait d’être confronté dans l’enfance aux microbes permet d’enrichir le microbiote intestinal dans les premières années de la vie ; et plus le microbiote est diversifié, mieux l’organisme résiste aux allergies [9].

Je n’insiste pas sur le rôle essentiel des probiotiques, dont l’effet anti allergène est reconnu : pour les adultes avec les bifidobactéries [10] et les lactobacilles, pour les enfants, avec lactobacillus casei [11].

L’herboriste, lui, ne manquera pas d’ajouter le rhizome du curcuma, celui du gingembre, ou encore les graines de cardamome, pour leur action sur la flore intestinale,

Contre les allergies, il vous parlera aussi certainement de sa petite favorite, la nigelle (aussi connu sous le nom de cumin noir) qui diminue congestion, démangeaisons, sécrétions nasales et éternuements [12]. Le plus simple est d’avaler une cuillère à café par jour d’huile, extraite de ses graines.

Chut…je ne peux pas vous dire son nom !

L’ortie, elle, est un excellent anti-inflammatoire et qui inhibe les récepteurs à l’histamine.

L’acide rosmarinique, un antioxydant présent dans la sauge, l’origan, la sarriette ou le basilic, est quant à lui utile pour contrer les effets inflammatoires liés aux allergies [13].

Une façon simple de préparer son remède est de faire une infusion à part égales en choisissant trois plantes. Trois tasses par jour pendant une semaine.

La feuille de plantain, extrêmement répandue en France, est également reconnue comme un remarquable anti-inflammatoire, expectorant et antispasmodique bronchique.

Voici ce que m’en a dit un herboriste que je ne peux pas nommer, sous peine de le voir emmener par les gendarmes…

« Ses feuilles tendres abritent des iridoïdes dont le principal est l’aucuboside, un actif aux propriétés antibactériennes, antitussives et anti-allergiques, et des mucilages qui facilitent l’expectoration ».

« En tisane, on laisse infuser 10 minutes à raison de 2 grammes par tasse, on filtre et on boit trois 3 tasses par jour le temps de constater une amélioration ».

Il est vrai que nous touchons là au cœur vital des intérêts de la Nation, et que cet individu mériterait d’être puni pour avoir diffusé des informations aussi dangereuses…

C’est le risque à prendre, aujourd’hui, quand on aime un peu trop les plantes.

Santé !

Gabriel Combris

Sources :

[1] Pierre Lieutaghi, Le livre des bonnes herbes.

[2] https://www.consoglobe.com/herboriste-diplome-france-cg

[3] https://www.frc.ch/pharmacie-un-conseil-deroutant-voire-dangereux/

[4] https://www.association-sante-naturelle.info/herboristerie-le-rapport-qui-fait-peur/

[5] D. P. Strachan – Hay fever, hygiene, and household size. BMJ. 1989 Nov 18; 299(6710): 1259–1260.

[6] Hesselmar B , Aberg N , Aberg B , Eriksson B , Björkstén B – Does early exposure to cat or dog protect against later allergy development? Clinical and Experimental Allergy : Journal of the British Society for Allergy and Clinical Immunology [1999, 29(5):611-617]

[7] Douwes, N. Travier, K. Huang, S. Cheng, J. McKenzie, G. Le Gros, E. von Mutius, N. Pearce – Lifelong farm exposure may strongly reduce the risk of asthma in adults – DOI: 10.1111/j.1398-9995.2007.01490.x

[8] Heinrich, B. Hoelscher, C. Frye, I. Meyer, M. Wjst, H-E. Wichmann – Trends in prevalence of atopic diseases and allergic sensitization in children in Eastern Germany – DOI: 10.1183/09031936.02.00261802 Published 1 June 2002

[9] Mumbi Munyaka P et coll. External influence of early childhood establishment of gut microbiota and subsequent health implications. Frontiers in pediatrics, 9 octobre 2014;2(109):1-9.

[10] Singh A et al. : Immune-modulatory effect of probiotic Bifidobacterium lactis NCC2818 in individuals suffering from seasonal allergic rhinitis to grass pollen: an exploratory, randomized, placebo-controlled clinical trial. Eur J Clin Nutr. 2013 Jan 9.

[11] Giovannini M et al. : Felicita Study Group. A randomized prospective double blind controlled trial on effects of long-term consumption of fermented milk containing Lactobacillus casei in pre-school children with allergic asthma and/or rhinitis. Pediatr Res. 2007 Aug;62(2):215-20.

[12] Nikakhlagh, Fakher Rahim et al. Herbal treatment of allergic rhinitis: the use of Nigella sativa. American Journal of Otolaryngology – Head and Neck Medicine and Surgery. 11; 32:402-407

[13] Osakabe N, Takano H, Sanbongi C, et al. Anti-inflammatory and anti-allergic effect of rosmarinic acid (RA); inhibition of seasonal allergic rhinoconjunctivitis (SAR) and its mechanism. Biofactors. 2004;21(1-4):127-31.
Takano H, Osakabe N, Sanbongi C, et al.Extract of Perilla frutescens enriched for rosmarinic acid, a polyphenolic phytochemical, inhibits seasonal allergic rhinoconjunctivitis in humans.Exp Biol Med (Maywood). 2004 Mar;229(3):247-54.